Des familles sont à la rue. Le Conseil des ministres restreint a mis sur pied des groupes de travail. Il y a urgence : on approche de l'hiver.
Les questions liées à l'asile et à l'immigration restent délicates au sein du gouvernement démissionnaire. Problème le plus visible : l'accueil des demandeurs d'asile qui viennent frapper à la porte de la Belgique. Le nombre de nouveaux arrivants a augmenté de 19 % entre le premier semestre 2009 (7 178 demandes entre janvier et juin) et le premier semestre 2010 (8 543 demandes). Le réseau d'accueil de 18 725 places est complètement saturé. Les centres ouverts gérés par Fedasil (l'Agence fédérale chargée de l'accueil des demandeurs d'asile), les centres de la Croix-Rouge, les initiatives locales d'accueil ou ILA sont archi-combles.
Refrain connu. La crise de l'accueil sévit depuis l'été 2008. Soit plus de deux ans. Fedasil est toujours dos au mur, dans l'incapacité de trouver des places pour héberger tous les demandeurs d'asile. Un millier de personnes sont toujours hébergées à l'hôtel, faute de mieux. Dont des mineurs non accompagnés demandeurs d'asile, particulièrement vulnérables. Ils peuvent pourtant s'estimer heureux : d'autres se retrouvent à la rue après avoir introduit une demande d'asile.
En quinze mois, 4 800 personnes au total, dont 200 à 300 enfants, n'ont pas reçu de désignation du service de dispatching de Fedasil, ont calculé la Ligue des droits de l'homme, Médecins du Monde et le Service droit des jeunes. A cette absence d'accueil matériel se greffe le refus du CPAS de Bruxelles, débordé, d'acter les demandes d'aide sociale des nouveaux arrivants - ce qui rend difficiles les recours contre ces refus d'intervention, ajoutent les ONG. Des camps de "réfugiés" (qui sont d'ailleurs souvent des déboutés en fin de droit) s'improvisent au cœur de Bruxelles, capitale de l'Union européenne
Au cabinet du secrétaire d'Etat à l'Intégration sociale, Philippe Courard (PS), on reconnaît que la situation n'est pas brillante. "Mais on a créé 3 400 places depuis mars 2009 pour étendre le réseau d'accueil" , y rappelle-t-on. Qui ne sont visiblement pas suffisantes pour absorber le flux de nouveaux arrivants.
Que faire ? Les réponses ne sont pas simples, parce qu'elles mêlent des enjeux budgétaires, matériels et politiques. En créant de nouvelles places, le gouvernement a peur de provoquer un appel d'air et de gonfler encore la masse des nouveaux arrivants. Si ces derniers n'ont pas - loin de là - tous droit à l'asile, les Etats ont l'obligation d'héberger les familles avec enfants, même si elles sont illégales.
Mercredi matin, un "kern" (conseil ministériel restreint réunissant les vice-Premiers et ministres concernés par la problématique) s'est penché sur le dossier. Sans prendre de décision. La problématique a été renvoyée en groupes de travail "pour faire avancer les choses". L'hiver n'est plus qu'à quelques encablures
Autre dossier en suspens : la régularisation des sans-papiers. Une soixantaine d'entre eux ont fait la queue mercredi matin devant le cabinet de la vice-Première ministre en charge de l'Emploi, Joëlle Milquet (CDH), pour dénoncer la lenteur de réponses du fédéral, un an après le début de l'opération de régularisation sur base de critères très précis. Dont l'obtention d'un contrat de travail d'une durée minimum d'un an. "Des milliers de demandeurs de régularisation n'ont toujours pas eu de décision", a expliqué Ruben Vandevyvere, porte-parole de Meeting, l'association, avec le Collectif des travailleurs sans-papiers, à l'origine de l'action à l'agence Belga. "Les patrons doivent attendre une décision beaucoup trop longtemps pour pouvoir employer quelqu'un. Le poste se perd et le travailleur sans-papiers est alors obligé de chercher un nouveau contrat de travail d'au moins un an, ce qui l'handicape dans sa demande de régularisation, puisque celle-ci dépend d'une promesse temporaire d'emploi."
An.H.
Mis en ligne le 16/09/2010
http://www.lalibre.be/actu/belgique/article/609917/la-crise-de-l-accueil-toujours.html