La plupart des plans hiver pour l’accueil des sans-abri se sont clôturés hier. La précarité, elle, perdure toute l’année. Des actions sont prévues ce vendredi.
Comme chaque année, la date du 31 mars marque la fin des plans "hiver" et "grand froid" bruxellois et wallon activés dès les premiers frimas, en novembre. Si mars marque l’arrivée tant attendue d’un redoux, la précarité, elle, n’a pas de saison. Elle ne s’arrête pas aux portes du printemps. "La fin de l’hiver n’entraîne pas la fin de l’exclusion", souligne l’association Médecins du monde (MDM) (1). Pour le Réseau belge de lutte contre la pauvreté (BAPN), la fermeture de la majorité des structures d’accueil hivernal d’urgence est "un drame pour plusieurs centaines de sans-abri qui avaient trouvé une ‘solution’ dans cet accueil". Désormais, c’est à nouveau la rue qui les attend (2).
De novembre à mars, quelque 320 sans logis, selon MDM, ont été hébergés par le Samu social de Bruxelles, dans un bâtiment mis à disposition par la Régie fédérale des bâtiments à Etterbeek. Outre l’hébergement, un repas chaud le soir, un petit-déjeuner le matin et l’utilisation des sanitaires, était organisée une permanence psychosociale tout comme des consultations (para) médicales, assurées par 75 infirmiers et médecins généralistes bénévoles de MDM. Au total, ils ont offert 2 472 consultations, soit environ 20 par jour.
Au terme du plan hiver, quels constats tirer ? "Près d’un patient sur deux se déclare en mauvaise voire en très mauvaise santé mentale. Observation confirmée par le fait qu’environ 16 % des patients font état de problèmes psychosomatiques", rapporte Stéphane Heymans, responsable des projets belges de MDM. En cause ? Nombre de patients souffrent d’un manque de perspectives d’avenir en termes de logement et d’accès aux soins de santé. Environ la moitié des patients ignorent, par exemple, où aller dormir après le plan hiver.
"Nous soignons durant l’hiver un groupe de patients qui redevient invisible le reste de l’année. Mais les problèmes de santé et l’exclusion des soins ne prennent pas fin pour autant", témoigne Kim Gielens, coordinateur du plan hiver pour MDM. "Contrairement à la population générale, les sans-abri ont davantage besoin de soins du fait de leurs conditions de vie. Or, l’accès à ces soins leur est plus difficile", appuie M. Heymans. Et d’avancer plusieurs explications. 1° Il s’agit d’un public qui présente des vulnérabilités multiples. 2° La première ligne médicale à Bruxelles tend à la saturation. 3° Les processus administratifs pour ouvrir les droits sont lourds et souvent assortis d’un délai de plusieurs mois. 4° L’accès aux médicaments s’avère difficile. "Entre 2009 et 2010, le budget de MDM destiné au dépannage de médicaments a augmenté de 53 %", précise M. Heymans. Enfin, toute une série de personnes comme les nouveaux Européens demeurent sans droits tant les procédures en vue de les obtenir sont complexes.
Pathologies respiratoires, ostéo-articulaires, dermatologiques et neurologiques. La rue n’épargne en rien la santé de ses "habitants". Dans son centre d’accueil, de soins et d’orientation (CASO), MDM prodigue toute l’année des consultations aux exclus des soins. Mais avec 4 500 consultations en 2010, "le CASO de Bruxelles est saturé", alerte M. Heymans.
Face à une paupérisation croissante de la population et à une crise de l’accueil des demandeurs d’asile, MDM plaide pour des "politiques de santé adaptées" aux personnes précarisées et exclues des soins ainsi que pour le développement de structures multidisciplinaires "qui travailleraient sur une réintégration médicale" et sociale dans leur ensemble et non plus dans l’urgence.
(1) Infos sur www.medecinsdumonde.be ou au 02.648.69.99.
(2) Le BAPN organise ce 1er avril quatre actions à Liège, Charleroi, Bruxelles et Anvers afin de communiquer leurs revendications aux instances politiques.
Stéphanie Bocart
Mis en ligne le 01/04/2011
http://www.lalibre.be/actu/belgique/article/652119/fin-de-l-hiver-mais-pas-de-la-precarite.html
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